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Yoann BOULDAY, gérant de FINANCE CONSEIL et membre partenaire du GIE Espace Innovation nous livre son sentiment sur la crise financière ainsi que sur les répercussions concrètes sur l’obtention des financements des entreprises.
Espace Innovation : Yoann BOULDAY, vous collaborez chaque jour avec des experts-comptables pour œuvrer à l’obtention de financements pour leurs clients. Dans le cadre de votre activité, quelle est votre perception sur l’environnement bancaire ?
Y.BOULDAY : Pour le cœur de notre métier, à savoir défendre les projets d’investissements des entreprises, nous constatons très nettement un durcissement de l’octroi des crédits.
La crise de liquidité génère un rationnement de l’offre de crédit, et certains établissements sont aujourd’hui plus mobilisés pour trouver de la ressource que pour octroyer des financements.
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De plus, la rareté de cette ressource et surtout la crise de confiance des établissements de crédits entre eux créent des tensions sur les taux. Par un effet de « cascade » cette crise de liquidité due pour partie aux SUBPRIMES trouve ses répercussions au plus bas niveau de notre tissu économique : les « TPE » ne sont donc pas épargnées par cette crise, ce qui leur pose problème dans leur recherche de financement (création, investissement, trésorerie, développement, acquisition…).
Ce phénomène qui pourrait s’apparenter à un « événement » touchant les hautes sphères de la finance peut aujourd’hui impacter « l’artisan breton » ou la petite société de service du Nord, en les pénalisant dans leur développement. Les experts-comptables qui sont les mieux placés aux côtés des chefs d’entreprises s’en rendent compte tous les jours sur le terrain.
Espace Innovation : Fort de ce constat, pensez-vous que le positionnement bancaire ait véritablement changé ?
Y.BOULDAY : Je pense que les priorités des établissements ont ponctuellement changé. La crise recentre prioritairement les établissements sur leur clientèle en portefeuille. Ils se focalisent donc sur la capacité de leurs clients à générer de la marge en les équipant de produits annexes.
Les 5 dernières années ont vu les banques utiliser les solutions de crédit comme un véritable produit de conquête, ce qui a favorisé la concurrence. Cette situation a naturellement bénéficié aux porteurs de projet notamment en matière de conditions. Pour exemple, à qualité de dossier équivalente, nous trouvons à ce jour 2 offres de financement lorsque nous en trouvions 4 ou 5 il y a 6 mois. Le message aux conseillers clientèle ne met plus le crédit au cœur du métier.
De ce fait, le phénomène de durcissement se caractérise par deux aspects :
- Pour les prospects, les services analytiques bancaires valident moins facilement les demandes et sont plus exigeants en matière de garantie,
- En cas d’accord sur le risque, les propositions financières ne laissent pas transparaître une réelle volonté de gagner le client. Nous n’assistons dorénavant que rarement à un dumping sur le taux.
Espace Innovation : Quelle est concrètement la répercussion ?
Y.BOULDAY : Les établissements proposent plus systématiquement du partage de risque pour limiter les volumes prêtés et mieux maîtriser leurs marges.
Le message en interne est clairement :
- Octroyons des financements à nos clients en restaurant nos marges,
- Travaillons la commercialisation de notre offre auprès de nos clients en portefeuille,
- Ne faisons plus du prospect, notre priorité.
Espace Innovation : Fort de ce constat, quel est votre positionnement ?
Y.BOULDAY : Tout d’abord, je tiens à signaler que la professionnalisation de la démarche nous permet fort heureusement de trouver encore des solutions pour les porteurs de projet à des conditions avantageuses.
Il convient néanmoins de rester en veille permanente car les conditions fluctuent très souvent en forte proportion. Il n’est pas rare de constater des hausses de 0.30% sur les taux fixes d’un mois sur l’autre. Donc, deux ou trois rendez vous bancaires ne suffisent plus pour nous donner un large choix et donc être pertinent dans notre conseil.
Pour ce qui concerne nos partenaires experts-comptables que nous « épaulons » dans leur démarche, là aussi les pratiques tendent à évoluer.
Les cabinets dont le temps n’est pas extensible sont amenés à professionnaliser leur accompagnement afin d’être les plus efficaces possibles dans leur conseil. Cela passe en interne par une formalisation de l’obtention des financements comme par exemple :
• En maîtrisant mieux le volet analyse et négociation des conditions (taux, garantie, conditions de fonctionnement de compte),
• En utilisant des supports structurés pour guider les porteurs de projet (check-list, questionnaire, grille de saisie papier),
• En adoptant un comportement plus pédagogique quand le projet comporte des zones de fragilité ou n’est pas viable tout simplement,
• En détaillant mieux certaines hypothèses chiffrées du dossier (CA, Marge, EBE,…),
• En intégrant un descriptif détaillé de la situation patrimoniale du porteur du projet,
• En proposant plus souvent l’accompagnement à la négociation…
Bref, la seule réalisation d’un prévisionnel chiffré ne suffit plus même si ce dernier est « techniquement » très élaboré.
Il faut désormais se mettre sur le canal de communication du décideur final, c’est-à-dire le banquier, et mieux orienté les dossiers qui s’apparentent plus à des « business plan ».
Le prévisionnel financier doit être motivé et associé à plus d’éléments rédactionnels… la présence de ratios sectoriels et l’explication d’unités d’œuvres sont des plus indéniables.
…et comme la forme compte autant que le fond, l’argumentation commerciale (savoir vendre son projet au banquier) devient essentielle.
Nous remarquons aussi que certains organismes comme les CER ont bien formalisé leur approche du service et que l’obtention de financement est chez beaucoup d’entre eux une mission très packagée. Les cabinets ont donc tout intérêt à poursuivre une démarche identique en mettant mieux en valeur leur conseil. Le seul « charisme » de l’expert peut ne plus suffire dans ce contexte…
Espace Innovation : Dans le cadre du Club Espace Innovation, vous animez une journée le 18 juillet sur la démarche gagnante pour obtenir un financement. En quoi consiste votre intervention ?
Y.BOULDAY : Nous essaierons de fournir un processus « clé en main » pour les membres du Club depuis le 1er rendez-vous avec le porteur du projet jusqu’à l’obtention du financement.
Nous verrons que chaque étape est importante et qu’elle nécessite l’utilisation d’outils et de supports que nous communiquerons en exclusivité aux membres du Club Espace Innovation. La force d’une chaîne se mesure au maillon le plus faible. Il est donc inutile de « bétonner » le dossier financier si la démarche n’est pas aboutie de bout en bout.
Par ailleurs, nous apporterons aux membres du Club un soutien « hot line » pour tous ceux qui voudront nous consulter durant la phase de constitution d’un business plan… jusqu’à notre relationnel avec le monde bancaire.
Cette journée sera aussi l’occasion de présenter en avant-première les résultats de notre étude nationale sur le financement des entreprises, menée conjointement avec notre partenaire RCA dont le logiciel PREVISION FLASH s’intègre parfaitement à notre démarche.
Il est d’ailleurs prévu de développer des « adonnes » au logiciel qui viendront enrichir l’accompagnement du porteur du projet que ce soit en amont (collecte de l’information) ou en aval (présentations orientées banque).
Espace Innovation : Pour conclure, quelles sont les perspectives pour les douze prochains mois ?
Y.BOULDAY : Sur les six derniers mois, nous n’avons pas constaté de baisse d’activité.
Le volume de dossiers traités est même en forte croissance (nous prévoyons de défendre 250 dossiers sur l’année 2008 contre 180 environs en 2007).
Toutefois, nous rencontrons plus de difficulté à obtenir du financement et nous nous attendons à une année plus compliquée.
Nous pensons que les effets de la crise financière s’atténueront sur 2009 et que le crédit redeviendra un produit de conquête à l’issue de cette période.
Fort heureusement, les porteurs de projets gardent tout comme nous et les experts comptables, une réelle volonté d’avancer.
Les périodes « tendues » poussent toujours à la professionnalisation d’une démarche… et c’est bien le cas aujourd’hui.
Yoann BOULDAY, Dirigeant de FINANCE CONSEIL
[email protected]
Téléphone : 02 41 72 84 96
Mobile : 06 07 48 30 82
FINANCE CONSEIL
45, avenue du grésillé
49000 Angers
http://www.financeconseil.fr
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Il me semble que si les banques peuvent chercher momentanément à se recentrer sur leur clientèle pour réduire leurs risques et améliorer leur marge, elles restent tenues, à moyen terme, au développement du nombre de leurs clients.
Par ailleurs, je ne pense pas que la remontée des taux soit achevée et il semblerait même logique que nous assistions à un relèvement des garanties, au moins dans un premier temps, puisqu'après la baisse des taux la concurrence s'était reportée sur les garanties.
En conséquence les dossiers de financements devront être encore plus argumentés et cohérents (avec les pratiques bancaires) pour relancer une saine concurrence entre les établissements de la place.
Rédigé par : Guillaume de GENTILE | 20 juin 2008 à 11:46