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La retraite constitue l’une des préoccupations majeures des dirigeants.
Avec la mise en place du droit à l’information et l’envoi systématique par les caisses du Relevé Individuel de Situation, vos clients vont se montrer demandeurs de conseils précis et objectifs pour leur permettre de prendre les mesures qui s’imposent.
Pour vous permettre d’illustrer l’impact des changements réglementaires sur les arbitrages à faire, nous vous proposons exceptionnellement un article technique issu des Alertes Mensuelles envoyées par Factorielles à ses abonnés experts-comptables.
Pour assurer la pérennité du régime complémentaire des artisans, les pouvoirs publics viennent d'adopter de nouvelles règles qui tendent à la fois à augmenter les ressources mais aussi à mettre en cause certains droits acquis...
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Comme nous le verrons plus loin, cette réforme dépasse le seul champ du régime des artisans. En effet, elle bouleverse le principe de revalorisation des pensions en connectant désormais la revalorisation des droits de retraite aux conditions plus ou moins favorables dans lesquels ils ont été acquis.
1 – Les problèmes financiers du régime complémentaire des artisans
Pour comprendre l'enjeu cette réforme, il faut rappeler les difficultés financières prévisibles auxquelles ce régime allait se trouver confronté.
Les chiffres à la disposition de la section des professions artisanales montraient des perspectives financières médiocres pour le régime vieillesse complémentaire obligatoire.
Les estimations établies par les actuaires faisaient ainsi apparaître deux chiffres inquiétants :
L'épuisement des réserves du régime à partir de 2032,
la détérioration du solde technique du régime (différence entre les cotisations et les prestations) qui à l'horizon de cinq ans menaçait de devenir déficitaire.
Face à cette situation, fruit du passé, les dirigeants du RSI en accord avec le Ministère des Affaires Sociales, ont donc décidé d'adopter un certain nombre de mesures à court et moyen termes pour assurer la pérennité du régime.
Elles trouvent leur traduction dans les deux textes suivants :
• Décret no 2007-1900 du 26 décembre 2007 relatif au régime complémentaire obligatoire d’assurance vieillesse des artisans (publiée au JO du 30 décembre 2007),
• Arrêté du 31 décembre 2007 portant approbation des modifications du règlement du régime complémentaire obligatoire d’assurance vieillesse des professions artisanales du régime social des indépendants (publiée au JO du 15 janvier 2008).
2 – Les solutions apportées mixent réponses traditionnelles et changement majeur
2 - 1 L’augmentation des cotisations : une mesure d’urgence mais insuffisante
Ce type de mesure présente l’avantage d’être facile à mettre en œuvre et immédiatement productif sur le plan financier.
L’augmentation va intervenir de la manière suivante :
Situation actuelle |
1er janvier 2009 |
1er janvier 2010 | |
Jusqu’au plafond
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7% |
7,1% |
7,2% |
Du plafond à 4 fois le plafond |
7 % |
7,5% |
7,6% |
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2 - 2 La mise sous conditions de ressources de la pension de réversion : les nouvelles règles du régime des commerçants font école
Dans un précédent numéro, nous vous avions alerté sur cette disposition instituée depuis 2004 au sein du régime complémentaire des commerçants.
Elle n’a pas tardé à se généraliser, malgré le changement fondamental qu’elle induit au sein du dispositif de la réversion.
Et c’est donc tout naturellement que cela s’opère en premier au sein du Régime Social des Indépendants.
Ainsi donc, à compter du 1er janvier 2009, une condition de ressources est instaurée dans les mêmes conditions que celles retenues pour le régime complémentaire vieillesse des commerçants relative à l’attribution et au service des pensions de réversion. Le plafond de ressources sera fixé par la section professionnelle artisanale. (la limite devrait être celle appliquée actuellement pour le NRCO des commerçants, soit près de 33 000 € par an).
2 - 3 Le changement des règles de revalorisation : une révolution !
Jusqu’à présent, au sein des régimes obligatoires de retraite, une fois les droits calculés, l’indexation s’opérait ensuite chaque année sur la base d’un taux unique de revalorisation.
Ce montant, le plus souvent fixé par référence au d’inflation hors tabac, n’est pas très élevé.
A l’avenir, pour les artisans, il le sera encore moins !
En effet, la réforme institue désormais le principe d’une revalorisation annuelle des droits différenciée selon les conditions plus ou moins favorables avec lesquelles ils ont été acquis.
Les nouvelles règles sont les suivantes :
Le principe :
La revalorisation de la valeur de service du point de retraite du régime complémentaire d’assurance vieillesse des artisans ne peut excéder l’évolution moyenne de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’année précédente, cette revalorisation pouvant être différenciée suivant la date d’acquisition et la date de liquidation des points.
Cette différenciation s’opère notamment pour les points attribués au titre des périodes d’activité artisanale ou assimilées antérieures au 1er janvier 1979 et pour les points cotisés attribués avant 1997.
Le dispositif :
• En application de l’article D. 635-8 du code de la sécurité sociale, l’évolution de la valeur du point de retraite ne peut excéder l’évolution de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’année précédente,
• Pour les pensions liquidées à partir du 01.01.2008, la revalorisation des points cotisés acquis avant 1997 est égale, à compter de l’année 2009, à 50% de l’évolution moyenne de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’année précédente,
• A compter de l’année 2009, la revalorisation de la valeur de service du point de retraite attribué au titre des périodes d’activités artisanales ou assimilées antérieures au 1er janvier 1979 sur la base de 33 % de l’évolution moyenne de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’année précédente.
3 – Quelles peuvent être à terme les conséquences de cette réforme
Les conséquences de cette réforme dépassent très largement le seul régime des artisans.
Deux points doivent particulièrement être soulignés :
3 – 1 La mise sous conditions de ressources de la pension de réversion du régime complémentaire
Cette solution mise en place en 2004 pour le régime complémentaire des commerçants fait manifestement tache d'huile. Dans la perspective des pouvoirs publics, cela s'avère compréhensible. En réduisant le montant des prestations servies au titre de la réversion, l'effort financier à accomplir au titre des pensions de l'assuré en sera d’autant minoré.
Selon la technique habituelle du domino, la prochaine étape concernera les régimes complémentaires des salariés Arrco et Agirc. La rapidité avec laquelle cette mesure a été étendue au sein du RSI peut laisser penser que la question viendra rapidement sur la table pour les salariés.
3 - 2 l'instauration d'une revalorisation différenciée des pensions
Les non-salariés montrent une fois encore combien leurs régimes peuvent servir de laboratoire pour la protection sociale française.
Finalement, cette mesure peut être lue de deux manières différentes :
• Il s'agit d'une atteinte grave portée à des droits acquis : en effet, jusqu'alors, dès lors que le nombre de points avait été établi par la liquidation de la pension, ce montant s'avérait intangible. Quelles que soit les conditions plus ou moins favorables dans lesquelles elle avait été obtenue, la retraite était revalorisée de manière identique pour chacun.
• Il s'agit d'une mesure socialement juste et financièrement efficace : elle permet garantir plus ou moins bien le pouvoir d'achat des droits obtenus en fonction des conditions dans lesquelles ils ont été acquis.
En réalité, cette mesure devrait connaître de beaux jours devant elle.
La France ne parvient pas à reporter de manière significative l'âge départ à la retraite.
De plus avec les difficultés de pouvoir d'achat des actifs et les contraintes financières des entreprises, on voit mal comment augmenter fortement les cotisations.
La seule solution possible consiste donc à réduire fortement les droits des retraités.
Le décrochage des mécanismes de revalorisation fournit alors un outil très efficace et relativement indolore dont les pouvoirs publics ne vont pas se priver.
Au-delà des effets d'annonce, la question du pouvoir d'achat des retraités va continuer pour longtemps à être un sujet brûlant !
Bruno CHRETIEN
[email protected]
Gérant de FACTORIELLES
Membre fondateur GIE Espace Innovation
Pour en savoir plus www.factorielles.fr
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